La Chronique de Jean Mapou: De retour à Fort
Par Jean Mapou
Nous venons de commémorer «de la façon la plus normale depuis un certain temps» la journée internationale des droits de l’homme. Quoi de plus normal que de faire ce que nous avions toujours fait durant les deux dernières décennies: faire entendre notre voix le seul de tous les droits est garantie en Haïti, quoique médiocrement.
On en a rien à foutre du symbolisme des dates importantes, c’est toujours une occasion de plus pour faire ce que nous avons fait depuis plus d’une trentaine d’années. Nous dressons dans un rituel d’hypocrisie l’état des lieux sur la situation des droits de l’homme; après nous dénonçons les violations. Parfois nous manifestons dans les rues et nos offrons un spectacle hideux prétextant faire valoir nos droits mais c’est quedal. Du n’importe quoi…
Comme toutes les dates historiques, nous avons marqué le 10 décembre sans tenir compte de sa profondeur. Depuis plus d’une trentaine d’années nous n’avons fait que de répéter ce qui a été dit ou fait. Nous revenons toujours à la charge pour rattraper soit les merdes que nous n’arrêtons pas de semer soit pour nous rattraper. Dans les deux cas nous sommes encore loin de nos comptes.
Heu oui! Si on considère toutes les décisions prises depuis les années 80 nous sommes en quête de résultats. On s’est pas mal défoncé détruisant le peu d’acquis que nous ayons pu avoir. Tous ce que nous avons fait c’est de créer des zones de non droit dans le pays, renforçant les écarts entre les groupes sociaux, les familles, créant plus de frustrations et de haines.
Nous avons passé près de la moitié des 72 ans de la déclaration universelle des droits de l’homme à massacrer les droits de nos concitoyens. Le pire c’est que l’État est le premier des prédateurs des droits humains. Le gouvernement d’une façon ou d’une autre cherche à rebâtir le fort dimanche.
Si on a rien vu venir, c’est parce qu’ils nous ont donné de quoi occuper notre temps. Le peuple est toujours en train de revendiquer ses droits. Pétitions, conférence de presse, participation aux émissions de libre tribune et manifestations de rue… tout ça va un jour s’envoler en éclat avec les deux derniers décrets sur l’Agence Nationale d’Investigation et le Renforcement de la Sécurité Publique qui qualifient implicitement les manifestants anti-gouvernementaux de terroristes, comme si une manifestation pourrait-être organisée sans dresser des barricades enflammées.
Bien avant ANI, la dictature de la misère, de l’insécurité, du banditisme d’État, des mensonges du gouvernement et de la pauvreté régnaient dans les quartiers défavorisés. Bref nous voilà de retour à fort dimanche! Les maux infligés au pays dépassent l’entendement, les réponses de la population doivent-être surprenantes et dépasser l’entendement du système. À malin, malin et-demie.
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